EN IMAGES. « Ils avaient le gîte et le couvert » : comment la vallée d’Ossau a sauvé les vautours fauves
Les vautours vivent en colonies qui peuvent compter plus d'une centaine de couples. •© Philippe Clément / MAXPPP
Publié le14/09/2025 à 06h30
La réserve nationale d’Ossau située dans les Pyrénées Atlantiques, à la frontière de la Nouvelle-Aquitaine et de l'Occitanie, a été créée il y a 50 ans pour protéger la population de vautours fauves complètement décimée. La réserve œuvre désormais avec les acteurs locaux et nationaux pour que les éleveurs s'en rapprochent.
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Notre politique de confidentialité Les vautours fauves ont failli disparaître des Pyrénées où ils ont été chassés à outrance. C’est la réserve naturelle nationale d’Ossau, fondée en 1974, qui les a sauvés. À l’époque, les derniers couples reproducteurs résidaient ici en Ossau. C'est la raison pour laquelle la réserve a été créée à cet endroit, au-dessus de la commune de Bielle. 50 ans plus tard, l'objectif est atteint puisqu'elle accueille environ 120 couples reproducteurs.
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Si la Réserve d'Ossau n'avait pas été créée, les vautours fauves auraient probablement disparu des Pyrénées. Des placettes d'équarrissage sont créées pour réconcilier les éleveurs avec ce charognard qui est parfois pris pour un prédateur.
"Il s'agit d'uneRéserve naturelle Nationale, donc cela signifie une protection forte, explique Jérôme Laffite, conservateur de la Réserve d’Ossau et salarié du Parc National des Pyrénées. On a même une réglementation qui interdit toute pénétration en période de reproduction des vautours. Ce qui fait que les rapaces naissant sur ce site ont une quiétude totale. Ça leur permet aux femelles de mener à bien la gestations et naissances".
Effectivement, le site extrêmement escarpé, n'est pas traversé par des sentiers ou des chemins. Il est interdit aux randonneurs ou tout autre visiteur dès le début janvier pour préserver la reproduction. Les survols, motorisés ou non, sont interdits toute l'année.
Falaises et barres rocheuses
"Ce sont des animaux rupestres qui vont nicher dans les falaises et les barres rocheuses. Ici en Ossau, on a la chance d'avoir aussi un pastoralisme bien vivace. C'est sûrement ce qui explique qu'à l'époque les derniers couples reproducteurs résidaient ici. Ils avaient le gîte et le couvert. En plus les mesures de protection qui ont été mises en place ont bénéficié à l'espèce".
On trouve désormais dans cette vallée les trois espèces de vautours présentes dans les Pyrénées : le vautour fauve, mais aussi le Gipaète barbu et le vautour percnoptère. Le vautour fauve a la particularité d'être l’un des plus grands oiseaux d’Europe. Adulte, il peut mesurer jusqu’à 2 mètres 80 et peser 10 à 11 kg. C’est un animal grégaire qui vit en colonies.
Le vautour fauve est l'un des oiseaux les plus imposants d'Europe, son envergure peut aller jusqu'à 2 mètres 80. •© Parc National des Pyrénées/L.Nédélec
"Il peut aller d'un seul couple à plus d'une centaine comme ici,complète Ludovic Lubet, technicien environnement de l'OFB (Office français de la biodiversité) Pyrénées Atlantiques. La prospection alimentaire, ils la font à plusieurs. Des éclaireurs partent et comme ils ont une excellente vue, lorsqu'ils repèrent une carcasse, ils plongent. Les autres vautours s'en aperçoivent : ils détectent un comportement particulier. De proche en proche, tous les vautours se rassemblent et, en quelques minutes, sans qu'on les ait vus dans le ciel, on peut retrouver jusqu'à une centaine de vautours sur une carcasse".
Les vautours ont une excellente vue, lorsqu'ils repèrent une carcasse, ils plongent à la verticale sur leur proie. •© Parc National des Pyrénées/L.Nédélec
Un charognard pris pour un prédateur
Ce charognard n'est pas un prédateur. Il peut se nourrir de gibier mort qu'il trouve naturellement dans la nature : biches, cerfs, sangliers, mais il se nourrit aussi de bovins, d'ovins ou d’équidés qui meurent en estive. Le vautour est parfois perçu par les éleveurs comme un prédateur. L'OFB a donc mis en place un plan destiné à mieux faire cohabiter le monde de l'élevage avec l'espèce. "On essaie de promouvoir l'équarrissage naturel et les services rendus par le vautour fauve. Il peut éviter la propagation de maladies, les contaminations de sources et tout ça, c'est gratuit", résume Ludovic Lubet.
Pour ce technicien de l'OFB, il peut arriver que le vautour, lors d'une mise bas ou quand un animal est en difficulté et moins mobile, se rapproche avant la mort de l'animal. C'est documenté : "il y a environ 3% des déclarations où on admet que les vautours arrivent avant la mort de l'animal mais dans la grande majorité des cas, l'animal est déjà mort".
"Pour nous, ces animaux en difficulté sont en grande détresse et même avec l'intervention soit de l'éleveur soit du vétérinaire, ils seraient quand même morts. Mais je comprends la réaction de l'éleveur. Les écouter et leur dire "oui c'est possible, le vautour peut intervenir avant la mort de l'animal", ça a été contesté pendant de nombreuses années. Depuis plus de dix ans, plusieurs rapports des services vétérinaires ont établi que dans les Pyrénées et dans les Grands Causses, dans une minorité de cas, le vautour fauve peut intervenir avant la mort de l'animal".Une évolution importante qui contribue à ce que les éleveurs se sentent considérés. Leur parole, au lieu d'être dénigrée, est aujourd"hui davantage prise en compte.
En 1974, il ne restait que quelques vautours fauves en vallée d'Ossau, les derniers spécimens des Pyrénées françaises. •© Parc National des Pyrénées/L.Nédélec
Placettes d'équarissage : un self service convoité
Les placettes d'équarrissage ont été créées dans le but de réconcilier éleveurs et vautours. Il s'agit de lieux aménagés en estive où peuvent être déposés les cadavres d'animaux. "Les éleveurs n'ont pas besoin d'attendre l'enlèvement par les services d'équarrissage qui peut prendre plusieurs jours",explique le maire de Bielle, Jean Montoulieu, également président de la Commission syndicale Bielle-Bilhères qui s’est investi dans le projet aux côtés de l'OFB.
Les placettes d'équarrissage sont des lieux aménagés en estive où peuvent être déposés les cadavres d'animaux. •© Parc National des Pyrénées/L.Nédélec
Un service gratuit et instantané
Avant les cadavres étaient déposés à n'importe quel endroit. La création de ce site dédié permet de rendre service à certains éleveurs en particulier. Si les filières bovine et ovine ont des conventions avec les équarrisseurs et paient un forfait à l'année, ce n'est pas le cas des éleveurs de chevaux. "Ils paient au coup par coup et au kilo,poursuit le maire. L'enlèvement d'un cheval, ça peut être 300 à 400 euros. Donc ce n'est pas négligeable. En plus de la perte de l'animal, l'éleveur doit débourser cette somme. Alors qu'ici c'est gratuit, instantané et homologué par la préfecture".
Jean Moutoulieu se félicite que les vautours fauves, animaux emblématiques de la vallée, puissent se nourrir. Mais il se défend de pratiquer le nourrissage car les cadavres laissés sur cette placette ne représentent , nous dit-il, que "5% de leur alimentation". Grâce au refuge que constitue la réserve d’Ossau, le vautour fauve a pu reconquérir d'autres sites du massif des Pyrénées.
article fr3 https://france3-regions.franceinfo.fr/occitanie/hautes-pyrenees/tarbes/en-images-ils-avaient-le-gite-et-le-couvert-comment-la-vallee-d-ossau-a-sauve-les-vautours-fauves-3215264.html